Par Myriam Quéméner, magistrat honoraire, docteur en droit
Pourquoi fermer le site Coco.GG?
Le site de discussion Coco.gg, établi en 2003, avait sombré dans les abîmes d'activités criminelles, devenant un véritable sanctuaire pour les pédophiles et autres prédateurs sexuels en ligne. Reconnue pour faciliter un large éventail d'infractions pénales, cette plateforme était le théâtre de comportements répréhensibles tels que la pédocriminalité, le proxénétisme, la prostitution, ainsi que la vente de drogues et d'homicides. Par exemple, un adolescent prétendant avoir 14 ans pouvait, en un rien de temps, recevoir des propositions dérangeantes pour des rencontres explicites ou des échanges de contenu inapproprié. À la suite de plus de 23 000 plaintes déposées concernant des abus ayant touché 480 victimes entre le 1er janvier 2021 et le 7 mai 2024, une enquête internationale a été lancée. Ainsi, les autorités françaises, par l'intermédiaire de la Direction Générale des Douanes et Droits Indirects ainsi que de la Gendarmerie Nationale, ont répondu à la demande de la juridiction nationale chargée de combattre la criminalité organisée (Junalco) en procédant à la mise hors ligne de Coco.GG le 25 juin 2024.
Quelles sont les infractions qui ont été retenues ?
Dans le cadre de l'opération, la section cyber et financière de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (JUNALCO), rattachée au parquet de Paris, a ouvert une information judiciaire sur la base d'une nouvelle infraction découlant de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023, dénommée loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOMPI). Cette infraction concerne la fourniture d'une plateforme en ligne permettant d'effectuer des transactions illicites en bande organisée, ce qui peut entraîner jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 500.000 euros d'amende. En outre, d'autres charges liées à la pédocriminalité, au proxénétisme aggravé, au blanchiment d'argent et à l'association de malfaiteurs ont également été retenues, soulignant la gravité des activités menées sur le site.
Quelle sont les suites de cette affaire ?
Le créateur de cette plateforme infâme, Isaac Steidel, a été arrêté en Bulgarie, avec trois complices interpellés en France, tous soupçonnés d'avoir joué un rôle significatif dans la gestion de Coco.gg. Les serveurs, précédemment utilisés par le site, étaient localisés en Allemagne, et le nom de domaine a été officiellement saisi par les autorités. Cette fermeture a soulevé l'intérêt de certains individus malveillants, conduisant à une recrudescence des tentatives de copies de la plateforme, dont certaines imitaient la structure du site désormais défunt. Bien que cette situation semble être sous contrôle pour l'instant, avec des mesures rapides prises pour bloquer ces répliques, une vigilance accrue demeure cruciale. Il est essentiel de rester attentif, car la possibilité de nouvelles simulations de ce type pourrait encore surgir sur la Toile.
Cette fermeture a été rendue possible grâce à une collaboration étroite entre plusieurs pays européens. Des serveurs ont été saisis en Allemagne et une opération d'envergure s'est déroulée en Bulgarie, avec la participation active des Pays-Bas, de la Hongrie et de la Lituanie. Il est impératif de renforcer ces efforts de coordination à l'échelle internationale pour garantir une lutte efficace contre ces fléaux qui portent atteinte à la dignité humaine et à la sécurité des populations victimes de telles abominations.
